L'épilation intime joue l'intégrale
De plus en plus de jeunes femmes choisissent de s'épiler totalement. D'origine orientale, cette pratique du sexe glabre commence à s'imposer en Occident.
«La première fois, je l'ai fait à la demande de mon ami qui l'avait vu dans un film X. Il trouvait ça sophistiqué et beau. Depuis, je suis une
adepte inconditionnelle: je prends rendez-vous une fois par mois chez mon esthéticienne et je l'entretiens dans l'intervalle avec un épilateur électrique.»
Valérie, la trentaine, n'est pas la seule à pratiquer avec régularité l'épilation intime totale. Barbara Steva, esthéticienne depuis trente-trois ans à l'Institut Barbara à Lausanne, le
voit bien: «C'est très à la mode cette année. La tendance s'accentue depuis deux ans. Je constate que les très jeunes filles s'y mettent de plus en plus tôt, à 16 ans déjà.»
«Nous avons lancé la pratique à Genève en 1996, dit fièrement Philippe Pavillard, administrateur du salon L'Ile de Beauté. Cette pratique, qui vient des pays chauds, était confidentielle
à l'époque. Elle est devenue courante en quelques années.»
Si certains instituts, notamment dans les petites villes, refusent de pratiquer l'épilation brésilienne, certains en font une spécialité: «Chez nous, c'est simple, quand on leur parle
d'épilation bikini, les filles demandent la totale à 99%, même si elles doivent souffrir, elles la veulent, dit Mona Meyer de l'institut de beauté oriental La Sultane de Sabah, au coeur
de Champel à Genève. Elles viennent chez nous aussi parce que c'est une pratique orientale courante, notamment en Egypte où les jeunes filles se font épiler intégralement depuis bien
longtemps. Nous pratiquons l'épilation au sucre, le secret de beauté des femmes orientales.»
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Les motivations sont diverses. «Les filles le font pour l'hygiène et pour le côté pratique, à cause des strings et des maillots de bain», dit Barbara Steva.
Mais la sexualité intervient souvent aussi dans ce choix.
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«Je me sens plus propre et, sexuellement, ça change tout: les sensations sont décuplées, dit Natacha, une grande séductrice genevoise de 28 ans. Sans parler de l'effet incroyable que ça
fait aux hommes. Comme ils aiment beaucoup, on y prend goût aussi pour cette raison!»
«C'est vrai, j'adore, confie Jorge, un employé de commerce lausannois de 26 ans. C'est plus agréable pour le sexe oral: personne ne veut plonger sa langue dans une perruque! Mais cela ne
veut pas dire que c'est indispensable pour mon plaisir. Pour moi, c'est purement esthétique et agréable, et cela n'a rien à voir avec un fantasme pédophile.» Les professionnels
connaissent bien cet intérêt masculin. «Nos clients demandent en priorité nos masseuses avec épilation totale et la demande est en hausse continue», dit JM, du Sex Center des Pâquis à
Genève.
En matière d'épilation, les tendances varient comme dans la mode vestimentaire. Ainsi, le «ticket de métro» reste très en vogue. Moins extrême que l'épilation totale, il consiste à épiler
le contour des grandes lèvres du vagin (ce qui conserve les avantages de sensation et d'hygiène), mais à laisser une bande verticale en dessus du pubis qui permet de sauvegarder
l'apparence de femme mature.
«Je trouve l'épilation totale un peu perverse avec son côté pédophile, dit Sandra, une banquière de 28 ans. Par contre, j'ai fait la surprise d'une épilation "ticket de métro" pour mon
copain le jour de son anniversaire. C'est joli et pratique, donc j'ai continué.»
Mais d'où vient ce plaisir de la sexualité glabre? «Outre le fantasme de la femme-enfant, qui existe chez certains hommes, j'y vois aussi la volonté des couples de se différencier dans
l'intimité, dit le psychanalyste Georges Abraham. Par ailleurs, les femmes veulent maîtriser leur corps, leur imposer des modifications: se raser rime avec une certaine désexualisation du
corps.» Ce que le grand sexologue français Gérard Leleu appelle une «chosification de la femme», qu'il voit d'un très mauvais oeil.
«L'épilation totale est une mode à fuir absolument, explique-t-il. Les femmes refusent ce qu'elles sont, elles ont peur de leur aspect sauvage. Une preuve de plus du manque de repères, de
cet amour devenu mécanisé, de l'imagination coupée par les films X et la pornographie en ligne.» En exigeant d'une manière ou d'une autre l'épilation, l'homme montre sa domination sur la
femme qu'il transforme en petite fille. Mais il n'y a là, dit le spécialiste, rien de pédophile, puisque la femme est formée et mature.
S'il est tant utilisé dans la pornographie, c'est aussi que «la culture du X cherche à attirer ainsi le regard sur les parties génitales d'une façon originale, analyse Georges Abraham. Un
sexe épilé est une nouvelle façon de le donner en spectacle.»
Comme les tatouages ou les piercings intimes, d'ailleurs, qui sont aussi à la hausse: «Le piercing du capuchon de clitoris est en très forte augmentation, dit Alexandre Moukhliss chez
Ethno Tattoo à Lausanne. Il y a peu, j'en faisais quatre par année. Maintenant, c'est deux par mois! Et la mode du taille basse fait décoller la demande pour les tatouages sur les hanches
ou au bas du ventre.»
Les motifs les plus demandés sont les petits fruits (fraises), les petites fleurs, et parfois des symboles chinois.
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